KOUCHNER: "UN'AREA DI 8OO MILIONI DI PERSONE PER IL BENESSERE E LA PACE. DA NOI DIPENDE IL MONDO"
Il discorso inaugurale al Grand Palais di Parigi del ministro degli Esteri ai diplomatici dei Paesi membri dell'Unione per il Mediterraneo
Discours d'ouverture de M. Bernard Kouchner lors de la réunion ministérielle précédant le Sommet de Paris pour la Méditerranée (13 juillet 2008) "Mesdames et Messieurs les Ministres, Nous voyant ici ensemble, plus de quarante pays unis et divisés par des siècles d'histoire, quarante pays entrelacés par l'esprit et par le sang, je ressens une émotion très intense. A travers nous, près de huit cent millions d'humains se retrouvent dans la paix. A travers nous, des générations d'espoirs déçus et de fatalité subie laissent soudain espérer un avenir plus équitable, plus juste, plus fraternel. A travers nous, un rêve est en passe de se réaliser, celui d'un projet collectif de développement économique, de paix, de droit et de solidarité : l'Union pour la Méditerranée.
Ce projet consiste simplement à prendre en mains ensemble les grands défis du siècle qui s'ouvre. Changement climatique, dégradation de l'environnement, accès à l'eau et à l'énergie, migrations, dialogue entre les civilisations, droits de l'Homme : de tous ces sujets dont dépend notre avenir, la Méditerranée est le centre. Non pas seulement le centre géographique, comme un simple aléa de la terre.
Mais le centre politique, historique et moral. Ailleurs aussi sur la planète de grands blocs régionaux veulent renforcer leurs liens. Nulle part pourtant sur la planète autant d'enjeux ne se concentrent autour d'un même espace.
Ne rien faire serait un risque. Nous sommes fragiles. Notre monde est fragile. Les tensions latentes et les disparités grandissantes sont trop dangereuses pour cette époque instable. Nous avons tout à gagner à renforcer nos liens. Le temps est à l'espoir. Autour de la Méditerranée, un esprit de dialogue s'est mis à souffler. Avec la conférence d'Annapolis et celle de Paris entre Israéliens et Palestiniens renaît la perspective d'un Etat palestinien viable et démocratique. Grâce à la médiation de l'Emir du Qatar et du Secrétaire gé... néral de la Ligue arabe, l'accord de Doha a permis l'élection au Liban du Président Michel Sleimane et la formation avant-hier d'un gouvernement d'union nationale.
Un dialogue indirect entre la Syrie et Israël a repris sous l'égide de la Turquie ; une trêve a été conclue à Gaza grâce à l'Egypte ; un échange de prisonniers devrait être bientôt réalisé entre Israël et le Liban grâce à l'aide des Nations Unies et de l'Allemagne.
Chacun a ressenti cet esprit de dialogue et d'espoir partagé. Il y avait une attente et une nécessité d'agir.
L'idée pourtant dut affronter les scepticismes et les tentations si courantes du repli et de la méfiance. Il fallait réunir sans imposer de modèle exclusif. Réussir un partenariat équilibré reprenant les acquis du Processus de Barcelone, les réformes courageuses engagées avec l'aide des fonds du Partenariat Euromed, le dialogue patiemment entretenu même dans les pires moments.
Une année de concertation fut pour cela utile et nécessaire. Une année pour enrichir le projet des apports de chacun.
L'Espagne, l'Italie, l'Allemagne, la Commission Européenne ont joué un rôle déterminant. L'Egypte, convaincue dès les premiers jours, a coordonné les positions du groupe arabe. Les concertations menées dans le cadre du Forum Méditerranéen en Crête puis à Alger, dans le cadre aussi du dialogue 5+5 à Rabat, ou encore entre européens méditerranéens à Portoroz, ont également été décisives.
A chaque fois, des ambassadeurs Euromed ont fait un patient travail que je veux saluer, en mentionnant tout particulièrement l'action d'Alain le Roy et de toute son équipe. Grâce à l'investissement de chacun, le projet est désormais plus fort, et je l'espère, mieux partagé.
Trois principes fondamentaux doivent aujourd'hui nous inspirer.
Tout d'abord, organiser une mobilisation politique au plus haut niveau, grâce aux sommets de chefs d'Etat et de gouvernement qui se réuniront tous les deux ans.
Construire ensuite ensemble une nouvelle gouvernance, paritaire et partagée, incarnée par un secrétariat permanent conjoint et par une co-présidence que l'Egypte et la France assumeront dans un premier temps.
Concentrer enfin nos énergies autour de grands projets concrets, répondant aux attentes des citoyens et construisant des solidarités de fait.
Pour que l'Union pour la Méditerranée réponde aux espoirs que nous plaçons en elle, il nous faudra en effet agir sur le terrain, au niveau le plus local, et en même temps penser en grand en associant les énergies, des pays du Golfe à l'Afrique, du nord de l'Europe aux rives méridionales de notre mer commune.
C'est ainsi que l'histoire pourra s'élancer, forte des ambitions immenses que chacun nous nourrissons. Faire de la Méditerranée une des mers les plus propres du monde, renforcer ensemble nos capacités scientifiques par les échanges de nos étudiants dans le cadre d'un Erasmus méditerranéen et par les échanges d'universitaires et de scientifiques, travailler à un plan solaire méditerranéenpour diversifier et accroître l'accès à l'énergie, aider nos PME du nord et du sud à investir en Méditerranée et à y créer des emplois, mieux mutualiser nos moyens de protection civile face aux catastrophes naturelles, développer des autoroutes maritimes entre l'est et l'ouest de la Méditerranée... Les projets sont immenses et légion. Ils seront complétés et enrichis au fil des années par l'apport de chacun et l'inventivité des sociétés civiles.
Je sais qu'il faudra trouver des idées et des moyens. Dans le cadre communautaire, le niveau de financement pour la Méditerranée doit être préservé. Au regard des défis collectifs qui nous sont posés, cela ne suffira sans doute pas. Il faudra à chaque fois être inventifs. Les bonnes idées s'imposeront et trouveront les moyens de leur réalisation. Toutes les voies devront être explorées.
Déjà, la participation massive des grandes institutions financières et des organisations économiques au Sommet d'aujourd'hui est le signe de leur intérêt. Comme elles, les entrepreneurs européens et méditerranéens sont prêts à investir si nous leur donnons un cadre. Ils l'ont dit au cours des différentes manifestations tenues ces derniers mois. Je compte particulièrement sur la société civile et les entreprises privées.
Là encore, notre unité, notre volonté et notre inventivité seront déterminantes. Je sais qu'elles seront au rendez-vous.
Mesdames et messieurs les Ministres, je suis très heureux de vous voir réunis tous ensemble autour de cette table. Personne n'y croyait il y a un an. Ce que nous faisons aujourd'hui, nous ne le faisons pas seulement pour les huit cent millions de femmes et d'hommes que nous représentons. Nous ne le faisons pas non plus pour les siècles d'histoire qui sont notre partage. Nous ne le faisons pas seulement pour offrir à nos enfants un monde plus stable et plus juste.
Ce que nous faisons aujourd'hui, nous le faisons au nom d'une certaine idée de l'humanité et de la solidarité.
Cette idée est née sur les bords de la Méditerranée, son cadre s'est agrandi, nécessairement. C'est là qu'elle doit offrir à nos citoyens et au monde la preuve de sa grandeur et de sa vivacité.
De cette grandeur, de cette vivacité, de cette inventivité, de cette nécessité, je vous remercie.".